Dépasser le stade de la fausse harmonie

Est-il possible de vivre une expérience de transition en groupe sans passer par des désaccords ou des conflits ? En quoi des groupes et projets de transition vivraient-ils dans une fausse harmonie ? Et pourquoi devraient-ils aller vers autre chose ? La Transition Intérieure pourrait-elle soutenir ces groupes dans leur cheminement ? 

Nombre de groupes démarrent avec une impression partagée que l’on y a les mêmes valeurs, qu’enfin on a trouvé des personnes qui pensent comme nous, qui voient le monde comme nous et ont envie du même changement. Cette énergie puissante et mobilisatrice accompagne le démarrage de très nombreux groupes et projets.

En chemin, le plus souvent, le groupe rencontre des difficultés. Des désaccords apparaissent. L’illusion que nous sommes tou·te·s sur la même longueur d’onde est ébranlée. Certains conflits peuvent douloureux. En réalité, le conflit fait partie de la vie, il est même nécessaire. Quand il est sain, il démontre que le groupe :

  • a dépassé la première phase d’évolution d’un groupe humain, où chacun·e est souvent prudent·e et très courtois·e,
  • reconnaît la force de points de vue différents,
  • est composé de personnes capables de se sentir en paix avec elles-mêmes et avec les autres, même quand les avis sont différents.

Pourtant, dans certains cas, les membres du groupe ne sont pas prêts à faire face à cette difficulté. Certaines personnes peuvent :

  • ne pas oser exprimer ce qu’elles vivent ;
  • fuir le conflit et quitter le groupe ;
  • tenter de mettre les problèmes « sous le tapis » et faire comme si tout allait bien, etc.

Même si ces personnes ont de bonnes intentions, ce type d’attitude va mettre en danger le groupe et le projet. Cela va créer des blocages, épuiser le groupe et peut même contribuer à aggraver les conflits et les difficultés, voire détruire le projet ou le groupe.

Certains groupes accueillent autrement la traversée de conflits. Ils se transforment pour continuer à aller de l’avant. Le passage de ce cap demande du courage. Il sera grandement facilité si le groupe passe par des processus de Transition Intérieure, par une vraie transformation culturelle.

Le chemin par la Transition Intérieure soutient les groupes pour les aider à transformer une situation difficile en une opportunité pour eux d’apprendre et de grandir.

Voici quelques pistes pour soutenir les groupes dans leur capacité à accueillir les conflits de manière transformative :

Approche préventive en groupe :

  • Réfléchir à la manière de travailler ensemble (y compris à la manière de gérer les conflits avant qu’ils ne surviennent). Cela peut inclure des accords écrits au sein du groupe, même si c’est évidemment la pratique qui importe le plus.
  • Avoir un ou plusieurs membre(s) ayant une expertise en communication et en résolution de conflits, y compris lorsque des émotions fortes surgissent (il s’agit d’une expertise technique, au même titre que le maraîchage ou l’agriculture bio !).
  • En cas d’insatisfaction, considérer qu’il est tout à fait acceptable d’en parler aux autres. Le faire avec l’intention d’obtenir du soutien pour aborder la question directement avec la/les personne(s) concernée(s).
  • Créer des espaces collectifs et réflexifs sécurisés pour exprimer ce qui se vit dans le groupe, ce qui est inconfortable, les tensions interpersonnelles, les désaccords, les conflits, oser regarder les ombres… Les accueillir avec bienveillance et les prendre en main courageusement et de manière inclusive envers les avis minoritaires. Prendre cela comme des occasions de grandir et d’apprendre ensemble.
  • Reconnaître l’existence de rapports de pouvoir dans tout groupe humain, les nommer et les regarder afin de transformer le pouvoir « sur » les autres (domination) en pouvoir « avec » les autres (coopération), et en pouvoir « en chacun·e » (puissance).
  • Reconnaître que mettre en place une horizontalité totale, où toutes les décisions se prennent ensemble et où les individus doivent toujours avoir l’accord du groupe pour agir, est une illusion.

Se former :

  • Développer des pratiques et compétences en groupe où l’on apprend à être assertif·ve et authentique.
  • Apprendre à sentir et oser dire un vrai « non » et un vrai « oui ».
  • Se former à la communication non violente (1), apprendre à s’ancrer dans les accords toltèques (2), pratiquer des constellations systémiques en groupe (3), etc.

Quand un conflit est là :

  • Explorer pourquoi un conflit surgit et cultiver notre capacité à nous sentir en paix avec toute forme d’émotion qu’il provoque en nous.
  • Reconnaître que les émotions vécues sont des signaux importants qu’il faut pouvoir entendre et prendre en compte.
  • Rappeler aux personnes responsables du conflit les accords qui ont été passés et les faire respecter.
  • Si quelqu’un vous parle d’une autre personne, utilisez la conversation pour les aider à régler le problème en direct. Les commérages peuvent s’avérer utiles s’ils sont considérés de cette façon !
  • N’envoyez pas de courriels ou d’écrits pour soulever ou répondre à des questions délicates. Organisez une rencontre. Si vous êtes nerveux·se, essayez de trouver une personne tierce qui accepte d’être présente pour vous permettre de vous sentir en sécurité.

Vous êtes un collectif en difficulté, et vous reconnaissez dans cet article ? Le Réseau Transition peut également vous aider dans ce processus en travaillant avec votre collectif pour répondre à vos besoins. N’hésitez pas à nous contacter à ce sujet.

Auteur : Josué Dusoulier 

(1) Anne van Stappen, Ne marche pas si tu peux danser, Poches Jouvence, 2009
(2) Miguel Ruiz, Les quatre accords toltèques : la voie de la liberté personnelle, Poches Jouvence, 2018
(3) Chantal Motto, Coacher les organisations avec les constellations systémiques, Dunod, 3e édition, mars 2020 et https://www.systemique.com/la-systemique/ecoles-de-pensee/constellation-systemique/et-concretement-le-deroulement-des-constellations.html